Selon un rapport, la COVID-19 fait des ravages sur le bien-être émotionnel et la stabilité financière des Africains, signalant la nécessité pour les décideurs politiques de stimuler l’emploi des personnes travaillant dans le secteur informel.
Selon ce rapport issu d’une enquête menée dans six pays du continent (Côte d’Ivoire, République démocratique du Congo, Kenya, Mozambique, Nigéria et Afrique du Sud), la COVID-19 a conduit à une réduction des revenus de plus des trois quarts de la population, les Kenyans étant particulièrement frappés du fait d’un confinement prolongé.
L’enquête, menée en novembre de l’année dernière, fait partie d’une série menée par GeoPoll sur l’impact de la COVID-19 en Afrique subsaharienne.
« Notre étude de l’été avait révélé que 76% des personnes signalaient une diminution de leurs revenus ; et dans la présente étude, 79% des gens ont déclaré que leurs revenus continuaient de baisser, même après juin 2020 », affirme Roxana Elliott, vice-présidente du marketing chez GeoPoll.
« Nous constatons également que ceux dont la vie a été le plus affectée par la COVID-19 signalent davantage de problèmes de santé mentale – au Kenya et en Afrique du Sud, qui ont parfois été soumis à des restrictions généralisées. Environ un quart des enquêtés disent se sentir bien plus mal émotionnellement qu’avant la COVID-19 », ajoute-t-elle.
Selon le rapport publié en décembre dernier, les chercheurs ont travaillé sur un échantillon de 3 000 personnes âgées de 15 à 35 ans dans les six pays, chaque pays comptant 500 enquêtés.
Roxana Elliott ajoute que l’étude s’est concentrée sur ces six Etats parce qu’ils représentent d’importantes zones de population et sont des centres économiques en Afrique orientale, centrale, australe et occidentale.
Elle confie à SciDev.Net que malgré une baisse des cas de COVID-19 dans certains pays africains, de nombreux ménages souffrent encore financièrement, émotionnellement et mentalement – la baisse des revenus étant plus élevée au Kenya et au Mozambique.
Mais l’étude suggère qu’il y a de l’optimisme sur le fait que la vie pourrait revenir à la normale et que la situation économique s’améliorera en 2021, 65% des personnes interrogées espérant que leurs finances personnelles s’amélioreront.
« Cet espoir est stimulé par l’arrivée [possible] d’un vaccin. Dans les pays qui ont ressenti les effets les plus importants de la COVID-19, près de 70 pour cent des enquêtés sont susceptibles de se faire vacciner dès que possible », explique Roxana Elliott à SciDev.Net.
Secteur informel
Martin Owino Omedo, responsable régional du suivi, de l’évaluation et de l’apprentissage pour l’Afrique chez Abt Associates, une organisation qui utilise des données pour améliorer la qualité de vie des gens dans le monde entier, a déclaré à SciDev.Net que la pandémie de la COVID-19 a révélé des faiblesses dans les systèmes économique, sanitaire et de gouvernance des pays d’Afrique subsaharienne et dans le reste du monde.
Il affirme que c’est un appel aux décideurs pour améliorer l’emploi dans le secteur informel qui contribue à 80% à l’emploi dans la région. Le secteur informel est composé de personnes qui sont des travailleurs indépendants et qui ne sont généralement pas salariées, comme les commerçants de détail et les petits exploitants agricoles.
« Il [le rapport] fournit un excellent discours politique sur le renforcement de nos structures d’emploi informel et la mise en place de filets de sécurité sociale en cas de réapparition d’une telle situation, ainsi que la possibilité d’examiner l’intégration du système de santé mentale dans un système de santé plus large », dit-il.
« La vaccination est le seul moyen scientifique et éthique de parvenir à l’immunité collective, de ramener les cas à un niveau acceptable ou d’arrêter complètement la circulation du virus », ajoute Martin Owino Omedo.
Mojisola Oluwasanu, chargé de cours au département de la promotion de la santé et de l’éducation de l’université d’Ibadan au Nigéria, affirme que même si la méthode utilisée par les chercheurs pour obtenir des informations est valide, elle peut ne pas être une réflexion complète ; car il se peut qu’elle n’atteigne pas les personnes peu alphabétisées de la population, souvent plus vulnérables aux impacts de la COVID-19.
« Ce rapport est essentiellement un appel aux gouvernements pour qu’ils développent des interventions pour la vie post-COVID », ajoute-t-elle. Et de conclure : « les thèmes de la confiance dans l’information et de l’acceptation des vaccins sont importants et constituent la prochaine étape majeur dans la lutte contre la COVID-19 au Nigéria et dans d’autres pays africains ».
Source : Sci Dev Net