Taux d’occupation et RevPAR en chute jusqu’à plus de 75%, les performances opérationnelles des hôtels en Afrique, comme un peu partout dans le monde, sont au plus bas. Même la période estivale n’y a rien changé. Pris au piège de la crise et attendant désespérément la reprise à plein régime de l’industrie du voyage, les opérateurs hôteliers tentent leur réinvention, histoire de défendre leur pré carré sur les marchés africains.
Et sur la question du tourisme d’affaires, Sébastien Bazin, PDG du groupe Accor se veut réaliste. « On va perdre une partie du tourisme d’affaires. Tout ce qui se fait sur les plateformes digitales va empêcher certaines personnes [de se rendre physiquement aux événements] », déclarait-il sur TF1 le 30 octobre dernier. Le patron du premier groupe hôtelier européen et présent dans 20 pays africains s’attend à ce que les chefs d’entreprises priorisent les webinaires à la présence physique de leurs collaborateurs aux événements, sauf s’il y a « vraiment » moyen d’y faire du business. Toutes ces réalités et surtout le besoin d’anticiper sont à l’origine du partenariat d’Accor avec la startup Wojo pour l’installation de 1 200 espaces de coworking dans les hôtels du groupe français en Europe. Rien ne filtre pour l’instant quant à l’extension de ce service à l’Afrique, mais il est clair que si les initiatives actuelles dans des mégapoles comme Casablanca suscitent l’engouement des professionnels, la tendance pourrait bien se généraliser, appuyée surtout par les réflexions ça-et-là autour de la réglementation du télétravail, notamment au nord du continent.
Clin d’œil gouvernemental
Pour l’instant, certains pays dont l’économie doit partiellement son rayonnement au tourisme, prennent des mesures pour accélérer la reprise et alléger la charge des opérateurs hôteliers. A titre d’exemple, l’île Maurice, où le secteur touristique représente 14% du PIB, lance un visa spécial d’un an destiné aux télétravailleurs du monde entier en quête d’un cadre ludique. Après avoir gardé les frontières fermées pendant plusieurs mois, le gouvernement procède finalement depuis octobre à une réouverture progressive, permettant le trafic aérien commercial international.
En Egypte où le tourisme représente 12% du PIB et 9,5% des emplois, les hôtels sont exemptés par le gouvernement du paiement des frais d’électricité, d’eau et de gaz jusqu’au 31 décembre prochain. Leurs dettes auprès des banques sont, en outre, rééchelonnées sans remboursement dû jusqu’au 1er janvier 2021.
L’aérien, ce catalyseur dont tous les hôteliers attendent le redémarrage
En dépit de cette sombre période, les groupes hôteliers sur le continent se montrent plutôt confiants pour l’avenir comme prévoyait d’ailleurs il y a quelques mois Elcia Grandcourt, directrice du département Afrique de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT) qui a lancé un programme d’accompagnement du secteur dont bénéficient certains pays africains. « Le tourisme africain se remettra de la crise liée au Covid-19 », affirmait-elle dans un entretien avec LTA. C’est dans cette logique que 68% des 219 projets hôteliers en Afrique subsaharienne se sont poursuivis malgré la crise, selon une enquête de HTI Consulting. Il y a eu également plusieurs annonces de développement sur le continent comme en Afrique du Sud où Radisson Blu vient de lancer sa quatrième marque ; Marriott qui nomme un nouveau président pour ses affaires africaines ou encore l’hôtelier de luxe Nobu Hospitality qui mettra bientôt en service à Marrakech son premier hôtel africain.
Mais au-delà de cet optimisme affiché, les opérateurs hôteliers ont conscience que leur activité reste tributaire de l’aérien. Ce maillon fort du tourisme également agenouillé par la crise avec des pertes qui pourraient dépasser les 40 milliards de dollars, d’après l’Association internationale du transport aérien. Toutes les compagnies stars du continent -d’Ethiopian Airlines à Royal Air Maroc- sont en crise et une reprise à plein régime de l’industrie n’est pas envisagée sur le moyen terme. Or, « tant que le transport aérien ne reprendra pas à au moins 40%, les hôtels continueront d’enregistrer des pertes entre 50 et 60%, voire plus », estime notre source dans le secteur.
Source : La Tribune